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La conservation en cosmétique bio : pourquoi et comment (suite)

Ces éléments, entre autres, montrent que si la « radioactivité » des produits traités n’est pas en cause, les rayonnements ionisants sont loin d’être sans effet ni risque sur la matière vivante, ses caractéristiques nutritionnelles et sanitaires. Sans parler du risque inhérent à la manipulation des sources radioactives utilisées pour le traitement (a priori sous contrôle…), on comprend mieux dès lors le refus de cette technologie en bio, qu’il s’agisse de produits alimentaires ou cosmétiques, destinés pour ces derniers à nourrir notre peau et ses cellules.

Les cosmétiques traités UHT :
une bonne solution inspirée de l’agroalimentaire ?

Courant 2008, on a vu apparaître sur le marché (vente en pharmacie et parapharmacie) des cosmétiques stérilisés par UHT, procédé largement utilisé dans l’agroalimentaire depuis les années 1960, principalement pour le lait (il a été inventé en Suisse !), mais employé également depuis pour d’autres produits laitiers (crème, yaourts), les jus de fruit, des vins, des sauces, etc. UHT signifie « Upérisation à Haute Température » ou « Ultra Haute Température » (le verbe upériser étant la contraction de « ultra-pasteurisation »).
En 2011, le laboratoire à l’origine de cette innovation brevetée a vu une prise de participation d’une société de cosmétique bio (certifiée Nature & Progrès), et a également commencé à fabriquer sous contrat une ligne de produits également traités par UHT pour une marque distributeur vendue en GMS depuis 2010. La marque vendue en pharmacie/parapharmacie est certifiée Ecocert/Cosmébio. Dans ce procédé, le produit est porté quasi instantanément à une température très élevée (légèrement supérieure à 135°C) pendant un temps très court (de 3 à 7 secondes), puis refroidi immédiatement, également en quelques secondes.
Le conditionnement doit être fait dans des emballages stériles, étanches à l’air et à la lumière. Pour les produits cosmétiques concernés, ceux-ci sont conditionnés dans des flacons opaques et airless, donc sans entrée d’air, et sans gaz propulseur. La technique était originellement complétée par un « bouchon antimicrobien en contact direct avec l’embout des flacons chaque fois que ceux-ci sont refermés », bouchon antimicrobien contenant un antiseptique (huiles essentielles autorisées en bio).
Ce bouchon ayant également fait l’objet d’un brevet et évitant que la goutte résiduelle après chaque utilisation ne soit contaminée n’est aujourd’hui plus utile, les fournisseurs de flacons étant maintenant capables de fournir des contenants encore mieux adaptés à cette technique.
Selon le fabricant, « les qualités et l’efficacité [du produit] sont intégralement préservées », ce qui semble confirmé par les retours positifs des utilisateurs. Ce procédé est légèrement plus onéreux de quelques centimes par unité (il nécessite une ligne de fabrication spécifique complexe) mais semble prometteur.

La stérilisation UHT, solution idéale au problème des conservateurs ?
Si les produits commercialisés semblent donc de bonne qualité, il est néanmoins légitime de se poser la question sur le maintien de l’intégrité des matières premières employées. En effet, toute personne ayant goûté en parallèle un lait UHT et un ait non-traité ne peut que constater que les deux types de produit n’ont pas le même goût, même si ce changement est moins marqué qu’avec un lait pasteurisé (dont le traitement à la chaleur dure plus longtemps).

Ceci est le résultat de modifications de la composition du lait qui sont bien connues6. Certes, même la FAO reconnaît que les valeurs nutritives du lait stérilisé UHT ne sont que « faiblement altérées », mais les chercheurs ont bien confirmé l’inactivation d’un grand nombre d’enzymes7 une dénaturation importante (de 40 à 80 %) des protéines du lactosérum, la réduction légère de la teneur en acides gras essentiels et du calcium et du phosphore solubles, la diminution du taux de vitamines, etc.
Concernant ces dernières, les pertes dans le lait dues à la stérilisation UHT seraient nulles pour les vitamines A, B2, D et E, mais peuvent atteindre 5 à 10 % pour la B12, 10 % pour la B1 et la B6, 20 % pour l’acide folique et 30 % pour la C, augmentant de plus avec le temps : au bout de 3 mois 35 % pour la B6, plus de 50 % pour l’acide folique et 100 % pour la vitamine C 8 9 10 La longue expérience avec le lait montre donc que la stérilisation UHT n’est pas totalement sans impact sur la composition chimique et nutritionnelle d’un produit traité.
C’est justement entre autres sur ces aspects qu’a résidé la difficulté et la durée de la mise au point de la technique spécifique aux produits cosmétiques. En comparaison du procédé agroalimentaire, montée et descente en température (avant et après le pic autour de 135°C) sont plus rapides et au total, les produits cosmétiques « souffrent » moins car étant soumis à une durée et quantité de chaleur moindre qu’un lait, d’autant plus qu’en général les laits sont chauffés avant (préstérilisation/pasteurisation), ce qui n’est pas le cas ici. En plus, la composition du lait est « fixée » par la nature, alors que le formulateur cosmétique peut anticiper (par surdosage) les éventuelles pertes qui seraient quand même causées par le process UHT. Ceci permet à l’inventeur du procédé d’affirmer, vérifications de laboratoire à l’appui, que l’impact sur le produit fini est quasi-inexistant. Ajouté au fait qu’il n’y a pas vraiment de limitation en matière de viscosité des produits ni de volume maximum du produit fini qu’il ne faudrait pas dépasser pour une bonne conservation (500 ml voire 1 litre sont sans problèmes, donc largement suffisant pour les cosmétiques !), les initiateurs de cette nouvelle technologie ont bon espoir de la voir se développer dans le futur sur l’ensemble du marché. L’avenir nous dira si tant les industriels que les consommateurs seront sensibles à ce bouleversement technique majeur.

6) Le changement de goût est dû à une légère caramélisation des sucres du lait lors du traitement UHT.
7) En établissant le profil enzymatique d’un lait, on peut ainsi établir le traitement qu’il a subi.
8) Elisabeth Vierling, Aliments et boissons. : Filières et produits, Doin Editions; 2e édition, 2003.
9) Le lait et les produits laitiers dans la nutrition humaine, Collection FAO: Alimentation et nutrition n° 28, Rome, 1995 10) The European Food Information Council (www.eufic.org)

 

 

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