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Sucre bio : de la canne avant tout

Qui dit sucre bio et durable, dit avant tout sucre de canne même si certains betteraviers soupçonnent une niche qu’ils cherchent à développer et que les substituts au saccharose prennent des parts de marché.

Plus d’une centaine de pays au monde produisent du sucre, à hauteur de 167 et 179 millions de tonnes dont seulement 20 à 22% de betterave ; cette part se réduit au moins de moitié si ce n’est plus, si l’on ne considère que le bio.

La production mondiale de sucre peine à couvrir la consommation : le déficit était compris selon les principales sources d’information  entre 2,2 et 5,2 millions de tonnes sur la campagne 2015/16.

La FAO estimait en 2015 la superficie mondiale cultivée à 27 millions d’ha dont 10,2 millions d’ha pour le Brésil, moitié moins pour l’Inde (5 millions d’ha), 1,8 million d’ha pour la Chine, ainsi que 1,3 million d’ha pour la Thaïlande qui est suivie du Pakistan. Les principaux pays exportateurs de sucre conventionnel sont : le Brésil, l’Inde, la Thaïlande, le Mexique, l’Australie et le Pakistan.

Bio versus développement durable

Sur cette filière cohabitent deux principaux standards durables volontaires: Bonsucro (non bio) et Fairtrade International ( bio et non bio) que nous allons comparer avec le bio. Rainforest Alliance s’intéresse aussi la production de canne à sucre mais en moindre mesure par rapport aux autres démarches.

Selon les derniers chiffres disponibles, ces 3 standards certifient 1,253 million ha soit environ 4,6% de la surface mondiale cultivée. Bonsucro domine largement avec 1,053 million d’hectares au 1er mars 2016, suivie de FairTrade puis du bio.

BonSucro : une croissance exponentielle

Cette initiative récente de développement durable mérite d’être mentionnée car si elle ne fait pas ‘grand bruit’ auprès du consommateur, elle attire des grands comptes tels Nestlé, Coca Cola, Mondelez, Pepsico, Bacardi… Et le résultat ne s’est pas fait attendre puisqu’il n’aura fallu que quelques années pour certifier 4,43% de la superficie mondiale de canne à sucre.  Fondée en 2007 (mais 1ère campagne en 2011), BonSucro est une organisation internationale à but non lucratif, multi parties prenantes, de développement durable dans la filière canne à sucre. Elle fonctionne sur plusieurs pays de production dominés, de loin, par le Brésil (plus de 80% des surfaces concernées et 31 des 37 producteurs membres) suivi par l’Australie avec 5 producteurs. Cinq catégories de parties prenantes constituent les membres de BonSucro : agriculteurs, raffineurs, intermédiaires, consommateurs finaux et société civile. BonSucro a développé un standard métrique pour une production durable divisé en 5 principes, 18 critères et 53 indicateurs. Ce standard concerne la production de sucre de canne, d’éthanol et de coproduits (mélasses, levures, bagasse, etc.). Par ailleurs, pour couvrir l’aval de la supply chain, l’organisation a mis en place deux instruments :

  • Un standard de traçabilité pour le commerce physique dédié à tout opérateur qui achète des produits certifiés. Ces utilisateurs, lorsqu’ils entrent dans ce schéma, peuvent alléguer de la durabilité du sucre utilisé sur les produits finis via le logo de BonSucro.
  • Un système de crédit au commerce

BonSucro couvre un peu plus d’un million d’ha pour 64 millions de tonnes de canne produite (3,87% de la production mondiale) transformée en 4,71 millions de tonnes de sucre (2,92% de la production mondiale) et 2,8 millions m3 d’éthanol.

Commerce équitable : une hausse modérée

La production de sucre de canne équitable sous label Fairtrade International a atteint 655 900 tonnes 2015 pour une surface de 167 276 ha (en hausse par rapport à 2014 : 156 441 ha). En 2015, 5 pays ont contribué à 75% de la production de la filière, par ordre décroissant d’importance : Paraguay, Fidji, Inde, Costa Rica et Belize. Ce classement subit de grandes variations selon les années ; 2015 aura été marquée par la venue sur le devant de la scène de l’Inde qui est passée de 40 000 tonnes de sucre en 2014 à 107 000 tonnes alors que Maurice a enregistré un volume dix fois inférieur à l’année précédente. Les surfaces moyennes des exploitations impliquées dans ce standard sont réduites : elles varient de 1 ha (Asie du Sud-Est) à 4,4 ha (Amérique Latine). Les 63 100 petits producteurs environ doivent faire partie d’associations ou de coopératives (au nombre de 100 en 2015) pour pouvoir bénéficier de ce standard. 30% environ du sucre équitable est aussi bio. Imposée par l’OMC, la réforme de l’OCM sucre (Organisation Commune de Marché, définie au niveau communautaire depuis1968) risque fort de porter préjudice aux petits producteurs des pays ACP (Afrique-Caraïbe-Pacifique) et PMA (Pays les Moins Avancés), principaux pourvoyeurs de sucre de canne équitable qui bénéficient jusqu’à maintenant d’un accès préférentiel au marché européen. Aussi, Fairtrade International cherche-t-elle à diversifier les débouchés au travers de la valorisation des sous-produits de la canne et la commercialisation dans les zones de production.

Sucre de canne bio : domination de 3 pays latino-américains

En 2013, les superficies en sucre bio étaient de 48 370 ha soit 0,2% des surfaces totales, en régression par rapport à 2012 où elles avaient atteint 61 200 ha. Depuis 2008, La production de canne à sucre bio a perdu 10% de sa surface. Trois pays latino-américains dominent ce secteur avec 2/3 de la superficie : l’Argentine, le Brésil et le Paraguay, avec environ 10 à 11 500 ha chacun. Loin derrière et par ordre décroissant d’importance : Cuba, Pakistan, Philippines, Colombie, Inde, Equateur et Mexique. La production de canne à sucre était estimée à 2,455 millions de tonnes en 2014.

Sucre de betterave bio : consigné à une niche

La filière du sucre bio de betterave reste embryonnaire et, a priori, vouée à rester un marché de niche. Quelques pays européens sont impliqués dans cette filière, Allemagne, Autriche, Suisse en premier lieu et plus à l’Est (Roumanie entre autres). L’Allemagne dispose en moyenne de 1200 ha depuis 2008, l’Autriche de 855 ha (2015 : +10% par rapport à 2014 mais en baisse relative depuis 2010 où elle avait atteint 1 116 ha) et la Roumanie de 500 ha environ. La France a, depuis quelques années, des velléités de s’y lancer mais elle se heurte aux mêmes freins que chez ses voisins. Ils sont d’ordre logistique et financier, alors qu’agronomiquement, la betterave bio est non seulement possible mais elle représente par ailleurs une bonne tête de rotation culturale et permet de fournir des sous-produits pour l’élevage bio. Logistique car l’outil industriel dimensionné pour traiter de gros volumes est peu adapté à des lots plus petits, sans compter la gestion des flux à mettre en place pour ne pas mélanger circuits conventionnel et bio. Financier car le coût de production reste peu compétitif face à la canne à sucre. Le sucre de betterave bio (versus sucre de canne) trouve une bonne acceptation auprès des consommateurs suisses et autrichiens mais est-ce suffisant pour induire une croissance durable ? Alors que des chiffres précis relatifs au marché du sucre bio en Europe sont inexistants, nous ne prenons pas un risque démesuré à avancer que la part de la betterave est inférieure à 10%.

Le sucre de betterave est commercialisé essentiellement sous forme ‘cristal blanc’ mais les options ‘glace’ et ‘gélifiant’ sont aussi disponibles.

Sucre (bio) de coco : une filière en devenir

Produit traditionnel et commun dans ses pays d’origine, le sucre de coco est mis depuis quelques années sur le devant de la scène car il fait l’objet d’un engouement récent dans les pays occidentaux. L’offre exportable a pour principale origine l’Asie du Sud Est : Philippines, Indonésie, Thaïlande. Alors que les Philippines et l’Indonésie sont déjà leaders mondiaux en matière de production de coprah (destiné à faire de l’huile), ils mettent dorénavant sur le marché du sucre de coco, en général bio UE et US, sans OGM voire Kasher et Hallal, destiné à la consommation directe. Ce sucre est exporté ou en vrac (et conditionné dans les pays de destination), ou en unité consommateur. La rentabilité est particulièrement intéressante pour les producteurs : 9 tonnes/ha (contre 1 tonne/ha pour le coprah) pour un produit vendu 5 fois plus cher que le coprah (prix départ ferme). Certes, ses coûts de production sont aussi supérieurs, néanmoins, le revenu net à l’hectare est, selon les sources officielles philippines, 36 fois plus importants que celui du coprah. Lors du 1er congrès relatif à l’industrie de la sève de coco qui s’est tenu aux Philippines en Mars 2012, le gouvernement de ce pays projetait, au travers de ses agences, un triplement annuel de la production. En partant de 70 tonnes en 2011, on atteindrait 17 000 tonnes en 2016. Il n’a pas été possible de valider cette projection. Néanmoins, il est fort à parier que les pays du Sud profitent de l’aubaine des préoccupations diététiques des pays du Nord pour améliorer le niveau de vie des producteurs de cocotiers.

Bettina Balmer – bettina.balmer@biolineaires.com

Suite du dossier : Avec… ou sans sucre ?

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