
À l’occasion du Salon International de l’Agriculture, l’Agence Bio, en collaboration avec l’ObSoCo, a présenté la 22ᵉ édition du baromètre de perception et de consommation des produits biologiques en France. Jean Verdier, président de l’Agence Bio, revient sur les enseignements de cette étude et partage sa vision de l’avenir du marché bio.
Bio Linéaires : Le 22e baromètre de la consommation de l’Agence Bio montre la fin de la baisse de la consommation des produits bio. Selon vous, quelles en sont les principales raisons ?
Jean Verdier : Deux choses. D’une part, le comportement du consommateur. Il y a eu beaucoup moins d’inflation au cours de 2024 donc il y a eu une relative possibilité de revenir vers l’achat auquel tient le consommateur, c’est-à-dire le plaisir, la convivialité et le produit bio est au centre de cette réponse. Les gens ont augmenté leur panier et leur fréquentation en magasin spécialisé bio.
Ceci dit, on n’est pas encore revenu au niveau d’il y a quelques années, à savoir que la fréquence d’achat était à 70 % une fois par mois, elle est tombée à 50 %. Charge à nous, Agence Bio, avec les autres opérateurs qui communiquent de faire revenir cette fréquence d’achat auprès de l’ensemble des consommateurs et de reconquérir les consommateurs que l’on a perdu en route.
BL : Dans le contexte économique et politique actuel ainsi que la réticence de certains sénateurs sur le bio en tant qu’opérateur bio depuis plus de 40 ans, président de l’Agence Bio, comment vous voyez évoluer le marché du bio dans les mois à venir ?
J. V. : Dans l’immédiateté, nous voyons qu’en 2024 les magasins spécialisés bio sont en croissance, ce qui est formidable. La vente directe, qui pèse à peu près 15 % des ventes a aussi fait de la croissance, c’est donc plutôt une belle hirondelle qui s’annonce.
Ensuite, dans la grande distribution, les pure players (Ndlr : marques spécialistes du bio) connaissent depuis quelques mois une petite croissance également. Ce qui ne veut pas dire que l’ensemble de la grande distribution soit en croissance mais on a bon espoir qu’elle revienne d’ici la fin 2025. On est encore loin des volumes de 2019 en termes de vente globale des produits bio.
En tant que transformateur de produits bio, je suis confiant. C’est dans le sens de l’histoire. Quand on voit la trajectoire globale de la bio, elle est toujours en croissance. Elle a déjà redémarré chez nos voisins, en Allemagne, aux Pays-Bas et en Grande-Bretagne. Il n’y a aucune raison que la France ne suive pas, surtout qu’en France, l’inflation est mieux maîtrisée, donc l’accessibilité est relativement un peu plus favorable.
Propos recueillis par Antoine Lemaire
« Le Bio n'est pas une affaire de riches »,
Laure Verdeau, directrice de l'Agence Bio
Ce baromètre révèle un paradoxe : plus de 7 Français sur 10 estiment que les produits bio sont meilleurs pour la santé et pour les enfants, 67 % considèrent même que leurs qualités nutritionnelles sont mieux préservées, et 8 Français sur 10 reconnaissent que l’agriculture biologique contribue à préserver l’environnement, les sols et les ressources en eau, et favorise la biodiversité… Pour autant, la consommation stagne (30 % des Français consomment du bio au moins une fois par semaine et plus de la moitié d’entre eux (54 %) au moins une fois par mois). En cause : le prix qui reste le frein principal à l’achat. Dans un contexte où 77 % des Français ressentent de la fatigue ou de la lassitude face à l’actualité et aux informations, la multiplication des labels alimentaires accroît ce phénomène.
Si le label AB, qui fête ses 40 ans en 2025, reste le premier label largement reconnu par les Français (93 %), cette notoriété n’est pas associée aux garanties des produits biologiques. Il ressort en effet de ce Baromètre – comme des précédents – que les consommateurs méconnaissent les garanties assurées par le label AB, ce qui constitue le deuxième frein à la consommation de produits bio.
Fait intéressant, ce Baromètre révèle l’aspect « pluriel » du consommateur bio (voir graphique ci-dessous). Allant à l’encontre de bon nombre d’idées reçues. Ainsi, 9 % des 18-24 ans déclarent consommer des produits biologiques tous les jours, loin de l’image d’un consommateur bio vieillissant… Le Baromètre montre également qu’il n’y a pas d’écart significatif sur la consommation quotidienne de bio entre riches et pauvres (9 % des plus hauts revenus, versus 5 % des foyers les plus modestes).