Le Chaudron de Mélusine remet l’offre locale et bio au centre du village

Emeline Le Rhun et Frédéric Borie nous présentent le Chaudron de Melusine à Lusignan (86), créé fin 2021, avec la particularité d’être passé en moins de trois ans du statut de petite épicerie alternative de proximité (EAP) à celui de magasin spécialisé bio de 120 m² privilégiant une offre locale, au cœur d’une commune rurale désertée par les commerces.

 

Bio Linéaires : Emeline, Frédéric, quel furent vos parcours jusqu’à la création de votre épicerie ?
Emeline Le Rhunet et Frédéric Borie.

Emeline Le Rhun : Je gérais les ressources humaines en milieu hospitalier jusqu’à ce qu’on me découvre une maladie rare, qui m’a obligée à arrêter de travailler. J’étais par ailleurs engagée dans un parcours d’enseignante de yoga, et j’ai décidé de m’orienter vers ce nouveau métier.
En même temps, j’ai rencontré Fred, qui avait travaillé comme caviste chez Nicolas en Angleterre et en France avant de devenir chef des ventes sur le Grand Ouest, puis d’enchaîner d’autres postes, dans le monde du vin, chez Biocoop, puis en formation commerciale.
Nous avions l’envie de créer ensemble un projet de vie sur Lusignan : en 2019, nous intégrons un dispositif d’aide à la création d’entreprise en milieu rural, avec pour objectif de créer une école de bien-être. Les débuts sont très prometteurs, on voulait proposer des activités de karaté, de yoga, des formations diverses,… qui ont toutes été refusées par la préfecture car jugées non essentielles.

 

La cave, second rayon par ordre d’importance, avec 25 % du CA et des conseils avisés.

 

Là dessus arrive le Covid au printemps 2020. Durant le confinement, nous réalisons combien notre petite ville de Lusignan, malgré sa richesse historique et culturelle, s’est en quelques années vidée de ses entreprises, commerces et habitants. Ce qui nous amène à réfléchir à apporter autre chose à notre territoire. Le constat était simple : nous mangions bio et il fallait parcourir 25 km pour trouver le premier magasin bio ou encore 70 km pour faire le tour des fermes bio du coin et obtenir un panier pour la semaine. On s’est dit qu’il y avait quelque chose à faire autour d’un lieu convivial où on pourrait trouver des produits locaux et bio. Fred avait travaillé chez Biocoop et moi, avec mon expérience de gestionnaire, on a décidé de créer une épicerie de village.

« En plus d’être 100 % bio, nous essayons au maximum d’apporter une offre « Bio plus » en valorisant des labels comme Nature et Progrès, Demeter, Bio Cohérence, Agri Éthique… »

BL : Concrètement, comment avez-vous lancé le projet ?

E. L. R. : Nous avions commencé par organiser des ventes directes « chez nous » avec des amis maraîchers, boulangers. Durant 18 mois, nous avons fonctionné comme ça, en cherchant les fournisseurs avec qui nous voulions travailler, tout en validant le potentiel grâce à nos premiers clients auprès desquels nous avons mené une étude de marché « grandeur nature » qui à généré plus de 240 réponses.
Cette démarche originale a séduit les banques qui n’ont pas hésité à nous suivre pour financer le projet et nous avons, en parallèle, obtenu un prêt bonifié auprès du département de la Vienne. Nous avons choisi d’ouvrir le 1er décembre 2021, dans un local de 30 m² faisant partie de notre maison, pendant le marché de Noël à Lusignan, afin de bénéficier d’une fréquentation accrue, nous faire connaître d’emblée et augmenter notre potentiel de clientèle. Aujourd’hui, nous disposons d’un bassin de clientèle de 10 000 personnes dont 2 500 intra muros, et pas d’autre magasin bio dans un rayon de 25 km, le dernier et seul concurrent ayant malheureusement fermé récemment.

 

BL : Que proposez vous dans votre magasin ?
L’importante offre fruits et légumes représente 35 % de ventes du magasin.

E. L. R. : Nous privilégions le goût, la qualité, et accompagnons les petits fournisseurs locaux en distribuant systématiquement leurs produits. Nous avons démarré notre activité en proposant uniquement des fruits et légumes locaux, mais nous avons vite constaté que l’offre de production était largement insuffisante dans notre département,
et avons donc choisi d’élargir le choix à ce niveau là. Sinon, nous sommes une épicerie du quotidien, avec environ 2 500 références, ce qui signifie qu’on a un peu de tout : du papier toilette en passant par les boissons, les fruits et légumes qui représentent 35 % du chiffre d’affaires, l’épicerie salée et sucrée, les céréales, et environ 80 références de vrac, souvent en pots de verres. Le succès de notre rayon vrac commence à nous poser des contraintes sur le service et nous réfléchissons à d’autres solutions plus autonomes pour une partie de l’offre.
Nous avons aussi un espace crèmerie avec une belle offre de fromages à la coupe, un peu de boucherie-charcuterie en vente directe sous vide, en partenariat avec des éleveurs locaux. Et une très jolie cave (25 % du CA), où Fred conseille la clientèle sur les spiritueux, les vins et les bières.

 

BL : Qui sont vos clients, qu’apprécient-ils en venant chez vous ?

E. L. R. : Nos clients nous ressemblent : ce sont des militants du bio qui font attention à leur santé, souvent vegan et intéressés par les produits sans allergènes, sans gluten, sans lactose. Nous avons développé toute une gamme « sans » pour eux. Ils aiment aussi les bons produits, y compris les plus jeunes qui apprécient notre offre de bonbons en vrac. Notre magasin ressemble plus à un intérieur de maison avec des meubles de famille plutôt qu’à une boutique organisée selon un modèle établi. Notre valeur ajoutée c’est une offre locale de qualité, du lien social dans une commune où il n’y en avait plus, du conseil sur la cave avec des produits tendance et sur l’herboristerie pour laquelle j’ai développé des compétences particulières. Et, bien sûr, le fait d’être ouvert 7j/7 avec de grosses journées le mercredi, le vendredi et le week-end.

 

Lire l’intégralité de l’interview dans Bio Linéaires N°118

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