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Signaux faibles de la bio, l’actualité décryptée – Partie 1 #Santé, le nouvel eldorado

La petite chaîne alimentaire indépendante de magasins bio et naturels Healthy Leaving market & café promeut aussi sur sa page d’accueil
la santé et le bien-être comme mission principale, au sein d’un lieu de vie. Source : healthylivingmarket.com

Voici les derniers signaux faibles de l’actualité de la bio et du conventionnel, décryptés par Sauveur Fernandez. L’information est analysée sous un nouvel angle pour en extraire tendances et mutations phares. Au menu : santé, le nouveau graal. 

Le groupe de distribution belge Colryut a acquis cette année 100 % des actions de la chaîne de fitness JIMS qui comprend 27 salles en Belgique et au Luxembourg, épaulées par des cours en ligne et du coaching numérique. L’enseigne a aussi racheté Culinoa, une entreprise belge majeure de restauration pour maisons de repos et de soins.

SIGNAL FAIBLE : le grand virage des distributeurs et des marques vers la santé. Colruyt s’oriente depuis quelques années vers un positionnement « alimentation santé » au travers du Nutri-Score, de son application de conseils nutritionnels personnalisés SmartWithFood, soutenus par des formations et ateliers de la Colryut Group Academy, pour ses collaborateurs et ses clients. Les deux acquisitions citées marquent une étape vers de nouvelles missions d’entreprise et une diversification économique de produits et services orientés santé.

“Stimulée par la Covid, la santé est en passe d’être un des enjeux de la décennie pour les enseignes et marques bio avec de nouveaux modèles économiques”

Ce grand tournant vers la santé des distributeurs alimentaires est stimulé par la crise sanitaire. Il prend de l’ampleur aux États-Unis, pays phare en la matière, avec plusieurs visages. Le distributeur régional Hy-Vee remet à niveau ses 275 pharmacies en étendant ses services de protection et bien-être comme sa couverture sociale Medicare Aisle. Hy-Vee compte aussi plus de 70 cliniques de santé implantées au cœur de ses magasins. Un haut poste symbolique de médecin-chef (chief medical officer) a été créé, qui cautionne le virage santé de l’enseigne. Le mot d’ordre de sa nouvelle génération de magasins alimentaires est d’ailleurs « Plus facile, plus sain et plus heureux ». L’univers des compléments alimentaires y est étoffé, avec des kiosques ou showroom d’optique et de matériel de fitness, des classes virtuelles d’éducation à la santé alimentaire, et des cours en ligne de cuisine saine. Healthie est une plateforme en ligne de téléconsultation avec un diététicien pour un entretien et un suivi personnalisés.

Wallmart, le n°1 de la distribution américaine a acquis quant à lui cette année la société de télésanté MeMD. Il se lance aussi dans les produits pharmaceutiques sous sa propre marque, et développe fortement ses cliniques en magasin, sur les pas de Kroger qui possède déjà 224 cliniques (The little clinic). Ce mouvement vers la santé est général et décisif. Même les distributeurs ultra-discount comme Dollar General se lancent.

Amazon, leader mondial de l’e-commerce, étend aussi ses services santé sur tous les fronts. Après Amazon Pharmacy (vente en ligne de médicaments sur ordonnance), Amazon Care est une plateforme de consultation médicale à distance avec un professionnel de santé, une délivrance d’ordonnance, et le déplacement d’infirmiers à domicile. L’équivalent français est le site Doctolib, en plein essor. Avec 140 000 professionnels de santé disponibles de son salon. Amazon étend aussi sa gamme Halo de bracelets connectés dédiée au fitness et concurrente de l’Apple watch et du Fitbit de Google. Son service Halo Fitness propose des centaines de cours d’entraînement physique en ligne.

La santé va aussi redéfinir les missions de l’univers alimentaire : le consommateur commence à percevoir son assiette comme un médicament « doux ». Amazon vient de lancer Halo Nutrition, une plateforme de conseils alimentaires et d’aide à la préparation de repas sains. Des services de livraisons de repas comme Factor75 se spécialisent dans les plats alimentaires diététiques.

Il est aussi de plus en tendance pour les marques alimentaires de détailler les vertus nutritionnelles de leurs produits comme l’américain Unboun ou le céréalier italien Geovita. Le e-distributeur belge Kazidomi insiste sur les vertus nutritionnelles des produits proposés. Le e-épicier américain Zippy Pantry va un cran plus loin avec un argumentaire santé appuyé et des produits alimentaires innovants comme les granolas Glow pour une chevelure et une peau plus saine. Certaines catégories alimentaires progressent rapidement comme les produits fermentés ou les boissons fonctionnelles grâce à leur aura naturelle de produits santé.

Comment doivent réagir les acteurs de la bio spécialisée ? Insister sur la valeur nutritionnelle d’un alimentaire au-delà du vague argument « produit sain » n’est pas encore dans la culture des enseignes et des marques spécialisées. Se contenter, de plus, d’un rayon de compléments alimentaires vendus comme des sauces ne peut suffi re à l’ère post-Covid. Les conseillers santé présents sur place sont encore rares, et pour l’instant inexistants en ligne. Pourtant, la concurrence active des pharmacies classiques, discount et alternatives [Anton et Willem] et surtout la vente en ligne vont accroître la pression sur les ventes. La GMS, en faiblesse dans ce segment reprend des couleurs avec de nouveaux concept-stores cosmétiques et santé dotés de conseiller(e)s santé (cf. Bio Linéaires n°92 p. 25). Créer à terme un réseau innovant d’officines, d’herboristeries ou de lieux de consultation (intégrés à un magasin ou indépendants) est aussi une option sérieuse. Pour marquer leur différence, les enseignes bio les plus dynamiques ont dans tous les cas raison de renforcer leur cahier des charges de référencement produit [le pionnier étant Satoriz]. Car les enseignes bio drainent encore les consommateurs bio les plus exigeants.

Quant aux marques, elles devraient non seulement insister, nous l’avons vu, sur les atouts nutritionnels de leurs produits, mais aussi lancer de nouveaux produits orientés clairement santé sur des segments sensibles (maman, bébé, seniors…), ce qui est encore rare. D’autant plus que le segment bébé actuel, par exemple, voit ses parts de marché fondre au profit de la GMS car pas assez innovant.

Prenons du recul. Le consommateur bio est en train de muter profondément, quel que soit son niveau de maturité. L’équation traditionnelle prix, choix, qualité et valeurs éthiques s’enrichit d’une nouvelle donne : le désir de transformer sa vie. Aiguillonné par la menace Covid-19 et les catastrophes écologiques de plus en plus courantes (incendies, inondations, éruptions volcaniques) chacun réalise plus ou moins confusément que la vie est fragile, que tout peut basculer, et qu’un produit, même bio, ne peut tout résoudre, car la santé véritable et la protection de soi nécessitent une approche globale. Ce qui comprend le bien-être émotionnel, et le besoin inclusif de se sentir heureux avec la nature et les autres.

Conséquence, les consommateurs sont de plus en plus nombreux à déclarer vouloir changer leurs manières de vivre. Au-delà du simple conseil produit, les marques et magasins bio doivent revoir leur mission en transmettant une vision de vie et en aidant leurs clients à transformer leur quotidien et à modifier leurs habitudes.

Sauveur Fernandez

Extrait de l’article “Signaux faibles de la bio, l’actualité décryptée” paru dans Bio Linéaires N°98 (Novembre / Décembre 2021).

La référence pour les professionnels de la distribution bio spécialisée et alternative

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