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1964, la Bio naissante s’organise … premières structures et première querelle

Le 1er juin 1964 est une date qui compte dans l’histoire de la Bio : c’est à cette date, en effet, qu’est organisée par la Sté Lemaire à la demande de Jean Boucher, la première journée nationale de l’Agriculture Biologique. Elle se tient à Châteaubriant en Loire-Atlantique : Georges Racineux en est le maitre d’oeuvre. Plus de 500 agriculteurs venant de toutes les régions de France et pratiquant pour la plupart d’entre eux l’agriculture biologique depuis plus de trois ans s’y retrouvent, heureux de faire connaissance et de confronter leur expérience. Quelques personnalités, comme Louis Pollen, président de le Fédération internationale pour la Santé publique, Gustave Marchives, président de l’ANDSAC, le maire de Châteaubriant sont présentes. M. Geffroy fils, de la Vie Claire, est également présent. Les visites de cultures, au cours de l’après-midi, viennent confirmer non seulement la réalité de l’agriculture biologique mais aussi sa fiabilité… une journée au cours de laquelle la bio apporte publiquement la preuve de son existence.

Après la conférence tenue dans la matinée du 1er juin 1964, les agrobiologistes venus de toutes les régions de France se retrouvent chez M. Boudet pour visiter ses cultures en bio depuis 4 ans

Autres dates importantes pour la bio en 1964 : les 21 et 22 juin. L’ANDSAC tient son Congrès à Chabanais (Charente) pour la défense de la santé des consommateurs. En résulte un manifeste qui, transmis par le député local au Ministère de la Santé Publique déboucha sur un texte interdisant « l’exposition de produits toxiques près des aliments dans certains magasins ». Mais ce manifeste soulevait essentiellement « la nécessité d’une réglementation stricte de l’emploi et de l’utilisation des engrais chimiques de synthèse et des produits toxiques de traitement en agriculture ». Autre point important qui caractérisa les travaux de ce congrès : contrairement à ce qui est généralement annoncé, au bénéfice d’une Association qui allait naître, c’est à ce congrès que furent élaborées les bases du premier cahier des charges définissant les normes de la qualité bio tant au niveau de la production en agriculture biologique qu’à celui de la fabrication et de la transformation des denrées alimentaires. C’est ainsi que pour la fertilisation des sols étaient absolument interdits les engrais suivants : engrais solubles azotés, nitrates, sels ammoniacaux, urée, sels de potassium, superphosphates, etc. (liste non limitative) et pour la protection des cultures, tous les insecticides, pesticides, fongicides de synthèse (captane, composé fluoré, arséniate, etc.).Un chapitre concerné à la tolérance indiquait que la porte était provisoirement ouverte au sulfate de cuivre ou Bouillie Bordelaise, en ce qui concerne uniquement le traitement des vignes et des arbres fruitiers et ce, durant la période de reconversion. Pour la fabrication et la transformation des denrées biologiques à partir de productions

biologiques, étaient absolument interdits toute addition de produits chimiques tels que gaz sulfureux, sulfites, ferrocyanures, colorants de synthèse, vapeurs de mazout, etc.. Un autre chapitre était réservé aux conditions attachées à l’attribution d’un label de qualité (1).
Le 24 juillet, sont déposés à Paris, les statuts de l’Association Européenne d’Agriculture et d’Hygiène biologiques « Nature et Progrès ». Cette Association devait marquer de son empreinte le long cheminement de l’agriculture biologique vers sa reconnaissance. C’est principalement sur l’impulsion de trois hommes qu’elle voit le jour : André Birre, ingénieur aux Ponts et Chaussées, Mattéo Tavera, architecte, ingénieur honoraire de la SNCF, arboriculteur et agriculteur, domicilié à Paris dans le l6ème où le siège de la nouvelle Association s’installe et André Louis, ingénieur agronome, professeur de lycée agricole domicilié à Bordeaux. Tous trois étaient membres de l’AFAB et n’approuvaient pas la décision prise par Jean Boucher et Raoul Lemaire d’unir leurs efforts, jugeant l’activité déployée par la Sté SVB Lemaire trop ‘’commerciale’’. C’est principalement cette raison qui fut invoquée mais peut-être n’était-elle pas la seule pour expliquer cette première scission ? Quand André Louis écrit en septembre 1965 à un de ses correspondants que la Maison Lemaire « est une maison de commerce, très âpre au gain et qui induit les cultivateurs en dépenses excessives », on peut en effet se poser des questions, car il ne peut ignorer que l’aspect économique apporté par l’application de la méthode Lemaire-Boucher est son principal facteur de réussite. Certes, on peut épiloguer sur la motivation de leurs fondateurs, (divergences sur le plan politique ou religieux, conflits d’intérêts, etc..). Toujours est-il que la nouvelle Association dont la présidence est assurée par M. Tavera et la vice-président et le secrétariat général par le Prof. Louis, se propose de promouvoir toutes les méthodes d’agriculture biologiques et insiste sur son caractère « indépendant de tout esprit de doctrines particulières et idéologiques, de toutes influences commerciales et de tout profit ». Il n’empêche aussi et malheureusement qu’elle signe le début d’interminables luttes intestines au sein du mouvement bio qui allait naître, luttes dont il se serait bien passé compte tenu de la puissance de ses véritables adversaires, les industries agrochimiques.
(1) réf. : Bulletin ANDSAC n°3 janvier-février-mars 1965 et Agriculture et Vie n° 7 Août 1964.

Mattéo Tavera et André Louis fondateurs de Nature & Progrès (Photo Nature & Progrès)

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