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Distribution bio américaine Whole Foods Market : les sept leçons du succès

Un poids lourd mondial de la distribution bio

Savez-vous que le chiffre d’affaire 2012 du distributeur américain de produits bio et naturels Whole Foods Market (WFM), estimé à 11,6 milliards de dollars US, est très proche de celui de la multinationale Monsanto (13,5 milliards de dollars US) ?

L’enseigne, née en 1980 à Austin, Texas, emploie 74 000 personnes, et comprend 349 magasins d’une surface moyenne de 3500 m2. Ces chiffres démontrent que les achats éthiques du consom’acteur exercent désormais une influence critique sur l’économie alimentaire industrielle, et bousculent l’imagerie populaire tenace du « baba cool » marginal du Larzac, mise en scène dans certaines publicités.

 

Leçon n°1 – Promouvoir des engagements forts… et savoir répondre aux critiques

La marque bénéficie d’une aura méritée d’enseigne responsable : elle a, par exemple, pratiquement créé le marché américain des aliments bio, soutient le commerce équitable, et exige de ses fournisseurs le respect de normes de traitement sans cruauté des animaux d’élevage, ce qui a beaucoup amélioré leur sort, l’Amérique étant bien plus laxiste que l’Europe à ce sujet.

● un engagement sociétal performant : WFM est cité depuis 16 ans par le magazine Fortune comme une des 100 compagnies où il fait bon travailler, grâce à une variété d’acquis rares aux USA : assurance-maladie, assurance vie et invalidité, épargne-retraite, etc. Les dirigeants et les caissières ont les mêmes avantages sociaux. Les salaires sont dévoilés et plafonnés. Le pouvoir est décentralisé et la voix de chacun compte : Future Search , est par exemple un stage de planification stratégique intensif de quatre jours qui a lieu tous les cinq ans. Des collaborateurs, des consommateurs, des actionnaires sont invités, avec les dirigeants, à co-créer la vision stratégique de l’entreprise. Plus de 5 % de la marge nette est consacrée à de nombreuses activités caritatives, notamment en faveur de pays défavorisés (aide aux petits producteurs, éducation nutritionnelle…).

● Whole Foods, sans défauts ? L’enseigne essuie cependant régulièrement des critiques fondées sur certains dysfonctionnements ou engagements : elle est par exemple accusée de favoriser des produits issus de grandes marques industrielles, au détriment notamment de petits producteurs nationaux ou locaux, dont les ventes représentent au final moins de 0,5 % de son chiffre d’affaire, alors que la communication met en vedette régulièrement ces derniers… On lui reproche aussi de trop privilégier la vente de produits dits naturels, au détriment des aliments certifiés bio, afin de satisfaire ses actionnaires : sa marge brute, confortable, est réputée plus élevée que celle de Walmart. Quand aux produits naturels, une partie contient des OGM, pas toujours bien mentionnés dans sa communication…

Cependant, le distributeur à l’intelligence de réagir rapidement à ces attaques, protégeant ainsi sa crédibilité : il s’engage par exemple à signaler pour 2018 l’intégralité des produits contenant des OGM (une action remarquable pour les é tats-Unis), et promet d’augmenter significativement la vente de produits locaux.

« Whole Foods Market : 11,6 milliards de dollars de CA, 74000 personnes… et un PDG végétalien »

 

Leçon n°2 – Des formations de haut niveau pour entretenir la flamme… et contrer la concurrence

Chaque membre doit suivre chaque année des séminaires de face à face, et dix sessions de formation Internet avec la WFM-Online- University. Ces formations continues sophistiquées, au-delà des programmes classiques (connaissance des produits, sécurité alimentaire, agriculture bio), ont aussi pour mission de diffuser une culture bio authentique (durabilité, nutrition), de former à une relation poussée au client, et, enfin, de veiller à ce que chacun ne se perçoit pas comme travaillant pour une épicerie, mais pour une entreprise qui cherche à faire le bien et à être un leader actif du mouvement (programmes Tribal Gatherings , Vision Days …).

 

 

Chaque ouverture de magasin est précédée d’un séminaire de deux jours qui a pour but de souder la nouvelle équipe… et de faire face à la concurrence économique locale…

 

Leçon n°3 – Cultiver le sens des affaires… éthiques

La réussite de la chaîne d’épicerie repose aussi sur un solide sens du commerce, que celle-ci sait transmettre à chacun de ses magasins, en même temps qu’un véritable esprit d’entreprise grâce à une large décentralisation du pouvoir : jusqu’à 15 personnes par magasin peuvent être chargées d’une analyse économique hebdomadaire des produits par catégories… avec une surveillance étroite des prix pratiqués par les concurrents. Chaque magasin se voit aussi allouer un budget annuel de 150 000 dollars à utiliser comme bon lui semble, que ce soit pour lancer une nouvelle offre en magasin, renforcer l’esprit d’équipe, ou inviter des conférenciers.

Précisons que l’enseigne reste typiquement américaine en ce sens que, pour elle, « faire » du bio et de l’argent ne sont pas antinomique. Son co-fondateur et PDG John Mackey, un végétalien et une figure clé du mouvement américain Conscious Capitalism , se plait à dire que l’amour et l’écoute des autres doivent être des objectifs au moins aussi importants que la rentabilité. Cette forte et sincère conviction quasi- messianique, dopée, nous l’avons vu par une approche commerciale décomplexée, et par une forte popularité, a suscité et légitimé une rapide expansion (croisade ?) commerciale, que d’aucuns qualifient d’hégémonique, le distributeur leader ne rencontrant désormais qu’une poignée de rivaux significatifs sur le sol américain…

 

Leçon n°4 – Encourager chacun à innover

L’autre cheval de bataille de John Mackey est l’innovation de rupture, un trait typique partagé avec la grande distribution conventionnelle française (Cf. Biolinéaire n°45). Outre les programmes de formation vus plus haut très orientés « Vision du marché », le distributeur édite un magazine digital, Dark Rye , dédié aux pionniers de la transition écologique, qui lui permet de repérer les tendances les plus marquantes… Chaque magasin est encouragé à innover et à expérimenter de nouveaux concepts de vente ou services au client sans l’accord du siège social. Le droit à l’erreur est permis, et, lorsque certaines initiatives fonctionnent, elles sont immédiatement copiées et propagées au sein de l’entreprise.

Par exemple, un magasin a initié un véritable bar à l’intérieur de ses murs, qui sert uniquement des bières issues de microbrasseurs. L’endroit à rencontré immédiatement son public, grâce surtout aux femmes qui le fréquente (elles s’y sentent sécurisées). Le concept, désormais nommé « Tap Room » à été rapidement implanté dans une centaine d’emplacements.

 

Leçon n°5 – Initier des concept-stores uniques

Whole Foods Market, habitué dès ses débuts à créer la tendance, mais désormais copié par ses rivaux (Trader Joe’s, Fresh Market, Wegmans), est aussi concurrencé par une nouvelle vague de distributeurs naturels positionnés « prix bas », suite à la récession économique (Sprouts Farmers Market, Natural grocers)… La marque, soucieuse de maintenir son statut de magasin leader et son temps d’avance innove en profondeur avec de nouveaux concepts de magasins qui sortent des sentiers battus :

● l e premier magasin-ferme avec toit-jardin des USA : fin 2013 verra à Brooklyn l’ouverture d’un nouveau type de magasin

 

« Locavore spirit » dont la grande nouveauté sera la présence sur son toit d’une ferme hydroponique de 1900 m2 qui alimentera en circuit ultra-court les magasins Whole Foods de New-York : les légumes verts à feuilles, herbes et tomates produits seront cultivés sans pesticides, avec un système d’irrigation avancé qui utilise jusqu’à 20 fois moins d’eau que l’agriculture conventionnelle.

● Des magasins positionnés low-cost pour les quartiers défavorisés : WFM à lancé en juin 2013 son 1 er point de vente orienté « prix-bas » dans le centre de Détroit, ville sinistrée symbole de la crise économique. Une expansion est prévue à la Nouvelle-Orléans et dans un quartier pauvre de Chicago, le South Side. Ces magasins du 3 e type comportent moins de personnel, plus de produits surgelés et d’aliments préemballés, et font la part belle a à la marque MDD de l’enseigne 365 Everydays Value .

● Du magasin bio au centre holistique de santé-beauté : la compagnie pressentant que l’avenir de la distribution alimentaire naturelle passera aussi par une prise en charge globale du client, 2015 verra à Austin, près du siège de la marque, l’ouverture d’un véritable complexe de bien-être physique et psychologique qui offrira des activités de remise en forme, des consultations de vie, des cours de cuisine et d’éducation nutritionnelle, etc. Ce projet revisité fait suite au demi-échec des 5 Clubs de bien-être lancés en 2011, eux-mêmes inspirés du programme interne « nutrition-bien-être » conçu (avec succès) pour les employés du distributeur.

 

La référence pour les professionnels de la distribution bio spécialisée et alternative

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