Face à une demande de produits « sans gluten » peut se cacher deux profils de clients et la première question à poser est « Souffrez-vous de maladie coeliaque – êtes-vous intolérant au gluten ? »
Si la réponse est positive, vous n’avez pas le droit de faire de faux pas. Pour les malades coeliaques , le RSG n’est efficace que s’il est suivi strictement. L’exclusion du gluten de l’alimentation constitue donc leur souci permanent. Son suivi est contraignant, notamment hors du domicile. Ils doivent être vigilants dans le choix des aliments du commerce et une connaissance systématique des ingrédients de chaque produit est indispensable. Si la réponse est négative, votre client recherche des conseils sur les produits sans gluten pour limiter certains de ses désagréments chroniques ou pour optimiser sa forme et son bien-être. La plupart du temps, ces personnes suivent également un régime alimentaire sans laitages, de type paléolithique ou hypotoxique type Seignalet. Pour ce RSG de «confort » il n’est pas obligatoire d’imposer les produits avec moins de 20 ppm de gluten.
Les grands principes du RSG
● Éliminer toute quantité de gluten
● Compenser les pertes en nutriments dues à la non consommation de produits avec gluten.
Éliminer le gluten de l’alimentation
A première vue, ce régime semble être simple à adopter avec l’éviction de seulement quelques céréales. Malheureusement, elles se retrouvent dans une grande partie de l’alimentation occidentale. Parfois clairement visibles comme le pain, les pâtes, les flocons de céréales, elles sont aussi dissimulées sous diverses dénominations et se retrouvent aussi là où on les attend le moins car le gluten sert de liant à beaucoup de préparations industrielles.
Aliments et dénominations à proscrire
Seigle (pain, farine et flocons)
Blé (farine, froment, pains classiques, biscottes, pâtes et raviolis, semoule, couscous, germe et son de blé, huile de germe de blé, chapelure, panure, seitan, boulgour, pain azyme, pain d’épices, viennoiseries, crêpes, gaufres, biscuits sucrés ou salés.)
Épeautre (farine et flocons)
Petit épeautre (pain, farine)
Blé Khorasan (farine et flocons)
Orge (farine, flocons, sirop d’orge, crème d’orge, bière et les dénominations : sirop, extrait, poudre, vinaigre)
Triticale
Avoine* (farine, flocons, gruau, son, crème d’avoine)
* L’avoine est consommable par une majorité de coeliaque mais est souvent contaminé en France. Contrôlez par un test sanguin (anticorps antitransglutaminase) l’innocuité de l’avoine non contaminé dans votre cas.
Avant de conseiller un produit, vous devez donc toujours regarder la liste des ingrédients et traquer la présence de multiples termes (voir encadré). Nous avons également vu que le blè khorasan serait mieux toléré, et vous pouvez donc le proposer à ceux qui suivent un régime de confort, tout comme le petit épeautre, en expliquant bien que ces deux céréales contiennent du gluten.
La levure chimique du conventionnel est également à surveiller car elle contient souvent de l’amidon de blé.
Pour la dénomination « amidon » ou « amidon modifié » ou « amidon transformé », il est obligatoire pour l’industriel de compléter par l’indication de son origine végétale spécifique, lorsque cet ingrédient peut contenir du gluten1 .
Donner des listes positives d’aliments
Ne vous contentez pas d’énumérer à vos clients ce qu’ils ne doivent pas manger mais axez plutôt vos conseils sur ce qu’ils peuvent mettre dans leurs assiettes, sinon ils se focalisent sur les interdits et pensent qu’ils ne peuvent plus rien consommer. Ils se projettent ainsi beaucoup plus facilement avec une liste positive qu’avec une liste négative. En premier lieu, vous devez rappeler que la base de l’alimentation n’est pas les céréales et les produits céréaliers mais la classe des légumes et des fruits frais ! Ensuite vos clients doivent
1) Directive 2003/89/CE du parlement européen relative au rapprochement des législations des États membres concernant l’étiquetage et la présentation des denrées alimentaires ainsi que la publicité faite à leur égard
compléter par une source de protéines (animale ou végétale sans gluten type légumineuses, oléagineux, soja) et ce n’est qu’ensuite qu’ils doivent se préoccuper des céréales et produits céréaliers. Vous avez bien sûr à votre disposition toutes les gammes spécifiques portant la mention officielle « sans gluten » et/ou le logo de « l’épi de blé barré » que vous pouvez recommander les yeux fermés et pour le reste, retrouvez en page 57 un tableau non exhaustif des aliments que vous pouvez conseiller.
Retenez que l’alimentation des malades coeliaques doit comporter le plus possible de produits frais, non transformés pour éviter une éventuelle source cachée de gluten.
Toutefois, vos clients doivent aussi se méfier des contaminations qui peuvent se produire pendant la préparation des aliments si toute la famille n’a pas le même régime alimentaire ; et à table surtout pour les enfants qui, bien que très raisonnables, peuvent facilement prendre les fourchettes ou les cuillères des frères et soeurs.
Compenser les pertes en nutriments dues à la maladie coeliaque
Comme nous avons vu, la maladie coeliaque entrave l’assimilation des substances indispensables au bon fonctionnement de l’organisme avant le diagnostic. Il peut alors se produire des carences ou déficiences en certains minéraux : fer et calcium et en certaines vitamines : les liposolubles (A, D, E et K) et les vitamines B1, B9.
Conseillez toujours de bien mastiquer chaque bouchée pour améliorer l’absorption de ces précieux éléments essentiels et si besoin, en prévention, orientez vers des compléments alimentaires à base de vitamines et minéraux, à prendre tous les jours au petit déjeuner en vous assurant que ces suppléments sont sans gluten. Pour cela, n’hésitez pas à demander une certification auprès du fournisseur.
Vos conseils quand la personne est à l’extérieur
Au restaurant ou chez des amis, il existe plusieurs pièges :
● Se méfier des amuse-gueule à l’apéritif qui bien souvent contiennent du blé. Opter plutôt pour les crudités type tomatecerise, concombre, carottes, les oléagineux natures (amandes, noix, noisettes, noix de cajou).
● Demander au restaurant des plats sans sauce puisque souvent de la farine de blé est ajoutée pour les lier.
● Le plat principal sera de préférence un poisson ou une viande mais pas de préparation à base de viandes ou de poissons pouvant contenir un liant contenant du gluten.
● Il est tout à fait possible par contre de se laisser tenter par le plateau de fromages mais il faudra le consommer savec une salade verte sauf si vous emportez votre propre pain sans gluten.
● En dessert, demander une salade de fruits ou un ananas frais tranché, un fromage blanc nature avec du miel ou un coulis de fruits rouges. La plupart des glaces et des sorbets de fruits sont également dépourvus de gluten ainsi que certains desserts maison type riz au lait, crèmes brûlées, oeufs au lait ou mousse au chocolat.
Les petits conseils en plus
Vos nouveaux clients coeliaques ont souvent besoin d’écoute, de soutien et de conseils sur les aliments à mettre dans leurs assiettes pour compenser les aliments interdits.
Ayez si possible toujours en magasin des livres de recettes sans gluten (pour coeliaques) que vous pourrez offrir à vos clients. Dites à vos clients de regrouper les produits sans gluten dans un seul placard ou un seul endroit dans le réfrigérateur.
Ces conseils ne remplacent bien évidemment pas les conseils d’un diététicien-nutritionniste. Ils peuvent vous servir de guide mais si vous avez le moindre doute sur un produit alimentaire, n’hésitez pas à demander une attestation au fournisseur. Et si le doute persiste, ne le conseillez pas.
Angélique Houlbert
Nutritionniste
Le Roundup cause de l’intolérance au gluten ?
Le Roundup, ou plutôt le glyphosate, sa matière active, pourrait être la cause de l’intolérance au gluten. C’est du moins ce qu’affirment les auteurs d’un article publié fin 2013 dans une revue scientifique*.
Article qui serait sans doute passé inaperçu si le Canard enchaîné ne s’en était pas fait l’écho en avril dernier, ce qui a amené de nombreux médias à relayer l’information. Les auteurs s’appuient sur plusieurs observations, faites notamment sur des poissons qui, exposés à du Roundup, développeraient des symptômes proches de ceux constatés chez les personnes intolérantes au gluten : perturbation de l’activité des hormones digestives (protéase, lipase, amylase), modification des villosités intestinales, sécrétion excessive de mucines tout le long du tube digestif, perturbation de la flore intestinale. Par ailleurs, le Roundup inhibe les enzymes cytochrome 45, qui jouent notamment un rôle important dans la détoxification des toxiques de l’environnement.
Une argumentation a priori assez convaincante, mais à y regarder de plus près il s’agit simplement d’une hypothèse, l’extrapolation du poisson à l’homme étant en plus particulièrement hasardeuse.
Il reste que la toxicité du Roundup est avérée – voir notamment les travaux de Gilles Eric Séralini – et que plusieurs études ont montré qu’on en retrouve fréquemment dans le corps humain et même (en très faibles quantités) chez certains consommateurs de produits bio**.
Une affaire à suivre, donc, en attendant d’autres études qui, si elles confirmaient la responsabilité du Roundup dans l’explosion des cas d’intolérance au gluten, seraient un sacré pavé dans la mare de Monsanto !
Claude Aubert
*Samsel A et S Seneff, Glyphosate, pathways to modern diseases : Celiac sprue and gluten intolerance, Interdiscip Toxicol. 2013 ;Dec 6(4) :159-184
**Krüger M et al. Detection of Glyphosate Residues in Animals and Humans, J Environ Anal Toxicol. 2014 4(2)