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L’impact positif de l’agriculture biologique sur le climat

Charles Pernin (au micro) a rappelé lors du congrès le constat issu d’études comparant différents modèles agricoles : « l’agriculture biologique est le seul système qui compense les gaz à effet de serre ». Photo Laura Duponchel.

Quelle part peut apporter l’agriculture biologique face au changement climatique et à la nécessité de réduire ses émissions de gaz à effet de serre (GES) ? Parmi les éléments de réponse apportés lors du congrès européen de l’agriculture biologique, les 16 et 17 juin 2022 à Bordeaux*, il ressort notamment que l’agriculture biologique est actuellement la meilleure solution pour la réduction des GES.

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L’Union européenne s’est fixée pour objectif (Loi climat) de réduire de 55 % ses émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030 (par rapport au niveau observé en 1990) et de parvenir à un bilan neutre d’émissions nettes d’ici 2050.

L’agriculture – de manière générale – est le quatrième émetteur de gaz à effet de serre dans l’union (481 millions de tonnes de GES) avec des différences d’un pays à l’autre. C’est ainsi le second poste d’émissions de GES en France (19 % du total national) avec 85 MtCO2 eq. émis en 2019 – source : Citepa), ce qui en fait le premier pays émetteur dans ce secteur.

L’agriculture biologique en rempart climatique ?

Dans son rapport sur le soutien à l’agriculture biologique, la Cour des Comptes (juin 2022) rappelle les résultats d’une thèse menée sur le site expérimental de La Cage (Yvelines) qui a l’avantage de présenter, à l’échelle de la parcelle, le bilan des émissions de GES selon les types d’agriculture. Avec à la clé «un bilan GES neutre pour l’agriculture bio, du fait des faibles intrants azotés (NOx) par rapport à l’agriculture conventionnelle, plus fortement émettrice de GES».

« La bio c’est plus que le climat », Cédric Guillod (BioSuisse)

Andreas Gattinger1, enseignant chercheur à l’université de Giessen (Allemagne), a souligné lors du congrès européen de l’agriculture biologique que l’AB «permet d’augmenter la séquestration du carbone mais doit être complétée par d’autres pratiques agricoles telles que le biochar [Ndlr : amendement du sol] et l’agroforesterie pour optimiser ses avantages. Il faut aussi améliorer l’utilisation de nos ressources». S’appuyant sur des méta-études actuelles, il a ainsi noté que la conversion arable en prairie et l’agroforesterie permettant davantage de séquestrer du carbone que l’agriculture biologique. 

Des fermes pilotes bio en Europe

Pour l’aspect concret, il faut regarder du côté du programme SOL MACC, un réseau pilote d’exploitations biologiques positives pour le climat, mené avec : 

  • un réseau européen de 12 agriculteurs installés en Italie, Suède et Allemagne ;
  • un réseau rassemblant 150 exploitations bio et non-bio en Allemagne ;
  • un groupe de 65 fermes situées dans des États fédéraux ou des territoires plus petits d’Allemagne.

Le programme SOL MACC, qui a duré cinq ans, rassemble chercheurs, agriculteurs et conseillers. «Les agriculteurs reçoivent des conseils techniques pour coordonner le réseau, il faut aussi que les agriculteurs puissent échanger entre eux», témoigne Sigrid Griese2, chercheuse pour Bioland, qui a présenté ce programme lors du congrès. L’ambition étant de prendre part aux objectifs de l’Union européenne en matière de réduction de GES via des pratiques innovantes.

Afin d’y parvenir, les fermes s’impliquent dans les quatre pratiques agricoles suivantes :

  • le recyclage des nutriments à la ferme
  • la rotation des cultures avec des prairies de légumineuses et de graminées
  • l’optimisation du travail du sol
  • l’agroforesterie.

L’ensemble de ces pratiques vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Elles engagent aussi des impacts positifs sur la qualité des sols, la biodiversité et la conservation des ressources. 

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L’intérêt de modifier ses pratiques

Les résultats compilés dans un rapport3 établissent notamment que le changement des pratiques de rotation des cultures a permis d’accroître la fertilité des sols, la fixation de l’azote et la séquestration de carbone. Le compostage a contribué à stabiliser et, dans certains cas, à augmenter le rendement des cultures tout en améliorant la qualité du sol. Le potentiel des haies, bandes tampons et du sylvopastoralisme pour séquestrer le carbone atmosphérique est noté ; l’introduction de légumineuses a également contribué à stabiliser / améliorer les rendements.

Le rapport signale un double intérêt pour les exploitations : les rendements sont restés stables ou se sont améliorés sans augmentation des coûts de mise en œuvre de ces nouvelles pratiques : «Les coûts de main-d’œuvre ont quelque peu diminué en raison du changement dans la gestion du travail du sol, mais augmenté avec les pratiques agroforestières».

L’agriculture biologique est la meilleure solution

Lors d’une conférence au titre évocateur «Agriculture carbone : les agriculteurs biologiques comme solution au changement climatique et à la biodiversité», certains pays ont présenté les objectifs nationaux en matière de GES (lire encadré). À l’image du Danemark4 où le gouvernement impose au secteur agricole de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 55 à 65 % d’ici 2030. 

En Suisse, l’ensemble des maillons de la chaîne impliqués

Alors que la Suisse a pour objectif politique de réduire de 40 % ses émissions de gaz à effet de serre, Cédric Guillod, vice-président de BioSuisse6, rappelle que depuis 1990, la Suisse a réduit ses émissions en diminuant l’élevage, rappelant « la nécessité d’avoir une alimentation plus végétale ».

Pour aborder la question de la réduction des GES, BioSuisse – qui regroupe 33 organisations bio – s’est associé au FiBL, à des distributeurs (Coop, Migros…), des associations écologiques (WWF, Bioland…) « afin d‘avoir un engagement de tous les maillons de la chaîne ». BioSuisse a voté lors de sa dernière assemblée générale, au printemps 2022, la protection et la résilience climatique afin d’atteindre le Zéro émission nette en 2040. Le FiBL estime qu’en Suisse, 25 % des terres seront menées en bio et en biodynamie en 2040.

Charles Pernin, délégué général du Synabio, a rappelé les études5 comparant les différents modèles d’agriculture. Avec un constat : «pour la production agricole, l’agriculture biologique est le seul système qui compense les gaz à effet de serre» mais aussi que l’agriculture extensive augmente davantage le stockage du carbone que l’agriculture intensive. L’agriculture biologique est ainsi actuellement la meilleure solution pour la réduction des GES.

CONV = conventionnel ; BI = bas niveau d’intrants ; AC = Agriculture de Conservation ; AB = Agriculture Biologique. Ce tableau présenté par Charles Pernin (Synabio) lors du congrès s’appuie sur les résultats du site expérimental La Cage dans les Yvelines (78).

« Une approche holistique est nécessaire » 

Alors que Sigrid Griese s’interrogeait le matin : «la séquestration promue par la commission européenne est-elle une opportunité pour l’agriculture biologique, alors que l’agriculture biologique est plus que la séquestration carbone ?».  

« Il faut que le bio soit le meilleur choix pour le consommateur sinon le bio restera toujours une niche », Sybille Kyed (Økologisk Landsforening)

Charles Pernin soulignait l’après-midi : «Pour aller au-delà de la question climatique, une approche holistique est nécessaire. Nous devons promouvoir le bio comme solution pour la transition agriculture/alimentation et promouvoir le rôle clé des entreprises bio comme moteurs de changement». 

En conclusion, on pourrait citer Sybille Kyed, responsable de la politique agricole et alimentaire de l’association bio danoise Økologisk Landsforening : «Il faut que le bio soit le meilleur choix pour le consommateur sinon le bio restera toujours une niche».

Laura Duponchel

*Retrouvez les interventions du congrès européen de l’agriculture biologique sur le site www.europeanorganiccongress.bio/ – rubrique Congress Materials (Documents du congrès).

1 Andreas Gattinger « How to achieve climate neutrality in organic farming ? ».
2 Sigrid Griese, Bioland R&D « The pilot network of climate positive organic holdings – Challenges of involving farmers in climate projects ». 3 SOL MACC – Demonstrating strategies for organic and low-input farming to mitigate and adapt to climate change – Layman’s report.
4 Sybille Kyed, Head food and farm policy, Organic Denmark « Carbon farming The CAP as a tool Pricing sustainability ». 
5 Charles Pernin, managing director Synabio « Carbon Farming : organic farming as part of the solution ».
6 Bio Suisse « Setting a Climate Goal and Programme ». 

Autres sources : https://solmacc.eu, Cour des Comptes « Le soutien à l’agriculture biologique – juin 2022 ». 

Réduction de l’empreinte carbone, séquestration du carbone dans le sol, impacts bénéfiques sur la biodiversité, la qualité de l’eau, de l’air et la fertilité des sols… Claude Aubert revient sur le rôle de l’agriculture biologique pour préserver l’environnement dans le dossier “Pourquoi produire et manger bio?” dans le prochain Bio Linéaires (N°105 – Janvier/février 2023). Sortie : début janvier 2023.

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