Basée à Avignon, FRDP est une entreprise 100 % bio d’une vingtaine de personnes, créée en 1997. Son métier consiste à créer des filières de fruits et légumes bio destinés à la surgé-lation. 80 % de son CA sont réalisés avec des transformateurs agro-alimentaires (400 clients en France et en Europe) qui utilisent ces fruits et légumes surgelés pour en faire des aliments pour jeunes enfants, ainsi que des plats préparés, des confitures, etc. Le reste du CA se partage entre restauration collective (15 %) et une gamme grand public distribuée exclusivement dans le réseau bio, sous la marque Bioregard (5 %). Interview de Marc Montluçon, président de FRDP.
Comment est née FRDP ?
La société a été fondée pour soutenir les approvisionnements en fruits et légumes surgelés bio de transformateurs alimentaires, qui avaient à l’époque des difficultés pour trouver ce type d’ingrédients. L’essentiel des agriculteurs et maraîchers bio travaillait en effet principalement pour le marché du frais, surtout de proximité, et on ne trouvait pas en France tous les ingrédients. J’ai tiré parti de mon expérience de l’importation et du négoce de produits surgelés pour monter des filières, en France et à l’étranger, afin de répondre aux besoins de ces transformateurs. FRDP a été un des tous premiers sur ce créneau.
Pour la production et la surgélation, je me suis d’abord tourné vers la Belgique et les Pays-Bas, ainsi que vers l’Espagne – pays qui étaient à ce moment-là plus avancés que la France en matière de cultures à destination de l’Industrie – créant au fur et à mesure de nombreuses filières qui n’existaient pas. Dans chaque pays, nous avons trouvé sur place les meilleurs partenaires spécialisés, fiables, pour surgeler au plus près et au plus vite ces fruits et légumes, ce qui est un gage de qualité.
Aujourd’hui, nous travaillons plus de 40 légumes et 15 fruits, soit plusieurs centaines de références, chaque fruit ou légume étant disponible sous différents formats et/ou tailles de coupe. Au total, cela représente chaque année 18 000 tonnes de légumes, le cœur de notre activité, et 500 tonnes de fruits. 18 000 tonnes de légumes surgelés, c’est équivalent à 30 000 tonnes de légumes frais !
Qu’est-ce qui différencie une entreprise bio comme la vôtre de ses concurrents conventionnels ?
Il existe bien sûr un grand nombre de spécialistes des fruits et légumes surgelés, qui proposent tous aujourd’hui du bio, vu le développement du marché. Ce sont des géants en comparaison de FRDP. Mais la différence entre eux et nous, c’est la même différence qu’il y a entre le bio et la Bio ! Toutes ces grosses entreprises fonctionnent comme elles l’ont toujours fait en conventionnel, en achetant au moins cher, travaillant avec des producteurs parfois intégrés à qui sont imposés telle ou telle production, et qui deviennent très dépendants de ces entreprises, alors qu’ils peuvent être délaissés du jour au lendemain. C’est un système qui a failli, avec pour résultat une agriculture qui ne survit que grâce aux subventions nationales ou communautaires.
Notre vision à nous, c’est de nous appuyer sur des producteurs agricoles et maraîchers qui enrichissent leur savoir-faire et leurs compétences grâce à notre partenariat. Nous leur permettons de gagner réellement leur vie et de rester autonomes. Dans la pratique, avec ces producteurs, avec qui nous sommes en relation directe – certains depuis plus de 20 ans ! – nous établissons des contrats pluriannuels sur le long terme, préfinançons si nécessaire les récoltes, l’achat de semences, aidons à l’acquisition de machines, etc. Il y a une réelle dimension sociale dans nos partenariats.
Nous collaborons également étroitement avec eux pour le choix des variétés, des tonnages, en fonction de leurs besoins, de leurs possibilités et de ce qui est compatible avec les nôtres. Nous n’imposons rien, même si bien sûr nous devons nous adapter au marché, car nous ne pouvons pas vendre n’importe quoi à n’importe quel prix. Plus on fait de produits ensemble mieux on se connaît, et mieux nous connaissons nos filières et nous les sécurisons.
Nos prix d’achats sont ceux que les producteurs nous demandent, la règle étant que l’agriculture bio doit être payée au juste prix au regard des risques et des engagements qu’elle exige. C’est un paramètre sur lequel il faut insister quand on voit que le conventionnel est moins cher, mais moins cher parce que excessivement subventionné, comme dit à l’instant.
Notre fonctionnement en direct nous permet de plus d’avoir une traçabilité très pointue, qui va jusqu’à la parcelle, ce qui est très loin d’être toujours le cas avec les entreprises conventionnelles qui manipulent des volumes énormes. Et sur le plan humain, nous avons un engagement RSE très fort. FRDP est d’ailleurs labellisée Bioentreprisedurable® depuis plusieurs années, et nous soutenons dans notre région des associations caritatives luttant contre le gaspillage alimentaire ou pour la préservation de notre environnement ainsi que de la biodiversité.
Relooking pour la gamme Bioregard
La gamme grand public Bioregard, qui existe depuis une quinzaine d’années, distribuée dans le réseau spécialisé via plusieurs grossistes bio, a été entièrement relookée. Intégrant encore plus de produits origine France, certains étant même labellisés Biopartenaire®, elle comporte 9 légumes différents, 6 mélanges de légumes et 6 fruits.
Comment êtes-vous organisés pour la surgélation ?
Nous avons un ou deux partenaires par pays : un aux Pays-Bas, deux en Belgique ainsi qu’en France, deux voire trois en Espagne, où nous avons eu l’opportunité de racheter, avec nos associés espagnols, un de nos prestataires. Nous y avons donc maintenant une petite usine à nous. Chaque région a plus ou moins ses spécialités, bien sûr, l’idée centrale étant d’être toujours au plus près des bassins de production. Dans tous les cas, nous suivons de très près le délai entre la récolte et la surgélation. Le plus exigeant, c’est le petit pois qui doit être transformé dans les 4 heures suivant la récolte. Le haricot vert est aussi assez exigeant, devant être travaillé dans un délai de 10-12 heures maximum, de même que les épinards. À l’inverse, les légumes racines, comme les pommes de terre ou les carottes, sont moins fragiles, et peuvent être stockés un certain temps au frais ou dans des silos.
Au mois de novembre 2021, nous avons inauguré dans les Hauts-de-France une nouvelle usine, dans laquelle nous sommes actionnaires avec des partenaires belges. Comme nous avons déjà beaucoup de produits origine France dans notre assortiment, nous allons pouvoir en faire plus, en contrôlant encore de plus près nos fabrications, pour une traçabilité encore améliorée du champ jusque chez nos clients. Nous allons y rapatrier une partie des tonnages transformés dans le nord de l’Europe, ce qui nous permettra de mieux maîtriser les plannings de surgélation et donc les délais de livraison ainsi que notre réactivité.
Que souhaitez-vous que l’on retienne de cet entretien ?
Un des points essentiels est l’attention extrême que nous portons à la qualité des filières et aux partenariats que nous avons construits, dont le but est, comme je l’ai dit, de permettre aux agriculteurs de garder leur indépendance, d’enrichir leur expérience et ainsi de sécuriser leur avenir. L’avenir des agriculteurs est un point auxquels les consommateurs sont de plus en plus sensibles. Le secteur des fruits et légumes surgelés ne doit pas s’affranchir de tout cela. Et en même temps, cela nous permet d’offrir à nos clients industriels un approvisionnement fiable et lui aussi sécurisé.