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Du bio à la biosociétale : nouvelles voies pour une bio nourricière et solidaire

Pionnière visionnaire pour la création d’une filière agroalimentaire durable, la bio est aujourd’hui à la croisée des chemins : son succès grandissant induit plusieurs approches plus ou moins rigoureuses. De nouveaux défis éthiques influencent aussi la chaîne entière de valeur (RSE, ESS, économie circulaire, transition écologique, autosuffisance et gaspillage  alimentaires…) et amènent à s’interroger : quelle bio, dite sociétale, voulons-nous au XXIe siècle pour mieux nourrir et assurer durablement la sécurité alimentaire de tous ? Le point minute sur les nouveaux devenirs de la bio.

La bio à 2 vitesses est bel et bien là : un constat, l’harmonisation par le bas des critères bio nationaux sous la bannière d’un label bio européen plutôt laxiste, encourage le développement d’une bio industrielle dégagée d’obligations environnementales et sociales fortes. En clair, une tomate bio d’importation, issue d’une agriculture intensive « à minima » et vendue en grande surface ne peux avoir les mêmes exigences de culture et la même charge éthique qu’une tomate bio forcément plus chère provenant d’une petite ferme paysanne engagée en permaculture ou en agroforesterie et vendue en direct, en circuit court, ou en magasin spécialisé bio (MSB).

Le bio en baisse de perception positive ? La montée en puissance des magasins généralistes bio issus du conventionnel comme Carrefour bio et le développement du E-commerce alimentaire vont aussi accroître l’offre en produits alimentaires bio de masse proposés à tous les prix. Le succès du secteur aiguisant les appétits, l’heure est au rachat de marques bio « pépites » par les multinationales, et à une politique accrue de « double vie » de la part des transformateurs historiques, engagés à la fois en conventionnel et en MSB. Face à ce « brouillage des cartes » le consom’acteur risque à terme de ne plus trop saisir en quoi un prix plus élevé en circuit spécialisé est justifié, en particulier pour les marques opportunistes présentes sur tous les circuits, avec le risque, à terme de voir les dérives régulièrement médiatisées d’une bio industrielle rejaillir sur l’ensemble du secteur.

L’ère de la biosociétale : face à une agriculture intensive et une PAC qui résistent, et en réaction aux pressions multiples pour amoindrir ses exigences, la bio doit (re)devenir un projet visionnaire et global de société qui renforce ses atouts initiaux, encore largement perfectibles, et élargit ses missions pour mieux répondre aux nouvelles demandes sociétales avec sept actions majeures :

1 / Soutenir l’adoption par le grand public de labels alternatifs plus exigeants que le label officiel EU : Bio Cohérence, Nature et Progrès, Démeter, bio équitable & solidaire…

2 / Un effort commun pour tous : la grande distribution et les grandes marques conventionnelles françaises vont désormais faire partie durablement de la grande famille du bio en contribuant au développement d’une bio « mainstream » touchant le plus grand nombre, ce qui implique dorénavant des responsabilités. Heureusement, la multiplication de nouvelles actions concrètes dans la création de filières solidaires sur le modèle du bio (Carrefour, Auchan, Super U, Monoprix, etc.) laisse espérer qu’une bonne partie de ces acteurs a conscience que la seule recherche de prix bas ne peut suffire pour être crédible et durer. Ces initiatives positives seront cependant freinées dans leur élan pour plusieurs raisons de fond (contrats de filières court-termistes, recherche pulsionnelle du prix bas et de produits calibrés sans rupture de commande, clientèle peu fidèle et peu soucieuse de changer ses habitudes, etc.).

3 / Améliorer l’alliance producteur-transformateur-distributeur-consom’acteur : Le coup de génie du bio français, a été, nous l’avons vu, la création d’une filière solidaire interdépendante qui lie l’ensemble de la chaîne de création de valeur et permet d’éviter les conflits entre agriculteurs et distributeurs tristement courants dans le conventionnel. Cette grande innovation sociale peut être renforcée avec une gouvernance participative ou coopérative plus poussée, par exemple, et en impliquant au quotidien le consom’acteur sur le modèle des coopératives 2.0 (cf. Bio Linéaires n°71 p. 23).

4 / Renforcer les exigences culturales : les défis ne manquent pas. Lutte pour le droit des semences bio issues de variétés anciennes locales, interdiction systématique du hors sol, rotation obligatoire des cultures, agroécologie paysanne de pointe, etc.)

5 / Participer à l’autosuffisance, à l’autonomie et à la sécurité alimentaires : les initiatives des territoires et des villes (Nord-Pas-de-Calais, Albi, Rennes, Paris…) indiquent une tendance salutaire à la politisation de la production alimentaire. La bio doit être un acteur important de la gouvernance alimentaire à venir en contribuant par exemple directement au maintien du foncier agricole et en coopérant étroitement avec les collectivités.

6 / Distribution agile : repenser en profondeur les systèmes logistiques de distribution, et moins dépendre des grandes centrales d’achats (une innovation de la grande distribution reprise par le bio au tournant des années 2000) pour accroître la production et la transformation de produits alimentaires locaux.

7 / Consom’action frugale : développer les initiatives anti-déchet, réduire les emballages, responsabiliser le consom’acteur. Encourager les formats familiaux, les produits sans eau, le retour à la consigne individuelle, etc. Vendre des gourdes et des trousses à gâteau pour le goûter des enfants, généraliser le vrac. Conseils en magasin pour conserver les aliments sans emballage.

Sauveur Fernandez – fsauveur@econovateur.com

La référence pour les professionnels de la distribution bio spécialisée et alternative

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