Distribution bio spécialisée en Hauts-de-France : analyse et perspectives

A Pro Bio a réalisé une enquête dressant l’état des lieux de la distribution bio spécialisée dans les Hauts-de-France. Cette étude, qui s’inscrit dans le cadre de l’Observatoire régional de l’agriculture biologique, offre un éclairage précieux sur les défis et les opportunités du secteur.

 

Les objectifs de l’étude

L’étude avait pour objectifs d’évaluer la situation de la distribution bio spécialisée pour l’année 2024, de comprendre les fluctuations passées au sein du secteur et d’anticiper l’évolution future du marché. Elle visait également à identifier les freins rencontrés par les magasins spécialisés bio (MSB) dans l’exercice de leur activité commerciale, à définir les leviers activables par le réseau associatif des Hauts-de-France ou par les pouvoirs publics régionaux, et à analyser les dynamiques d’achats passées et à venir.

Le profil des répondants à l’enquête

12 gérants de 7 enseignes différentes ont été rencontrés, représentant 18 magasins spécialisés bio ouverts en région : Biocoop, Biomonde, Leopold, Label Vie, l’Âne Hilare, Autour du Verger, La Vie Claire.

Quatre gérants de magasins bio spécialisés récemment fermés ont également été rencontrés, représentant 12 MSB : Biocoop, Label Vie, Bio Bon Gourmand et La Vie Claire.

Diminution des surfaces de ventes

On assiste à la fois à une reconfiguration des surfaces de vente en bio mais également à une diminution progressive des ouvertures, parallèlement à une augmentation des fermetures. Par ailleurs, la surface de vente moyenne a chuté en 2023, passant de 268 m² à 250 m² en un an.

Recul du nombre de MSB dans la région

Depuis le début de l’année et jusqu’à juin 2024, 10 magasins bio (9 MSB et 1 épicerie vrac) ont cessé leur activité ou ne sont plus certifiés en bio dans les Hauts-de-France. En 2023, la région enregistrait 25 fermetures de MSB et aucune nouvelle ouverture.

La région Hauts-de-France a été fortement touchée par la crise de la distribution bio spécialisée. Au sein du classement du nombre de MSB par région, elle est 8e sur les 14 régions françaises en 2019, puis 9e de 2020 à 2022 et enfin 10e en 2023.

Le département du Nord – notamment avec la Métropole Européenne de Lille (MEL) – et celui du Pas-de-Calais captent davantage les MSB, en comparaison avec l’Aisne, la Somme, ou l’Oise. Ce contraste  s’explique notamment par une disparité démographique.

Problématiques partagées

L’ensemble des entretiens a mis en exergue de nombreux points communs entre les visions des gérants interrogés, même s’ils ne représentent pas les mêmes enseignes. D’après les résultats de l’enquête, il s’agit de se questionner sur :

  • L’attractivité des magasins bio,
  • L’attractivité des emplois en magasins bio,
  • Le renouvellement de la clientèle des magasins bio,
  • La fidélisation du client,
  • La place de la vente sur internet,
  • La création de liens forts avec les producteurs – fournisseurs.

Perspectives pour la distribution bio

Les gérants de MSB apparaissent comme des relais privilégiés entre un territoire, ses consommateurs et l’ensemble des acteurs de la filière biologique. Ainsi, il apparaît nécessaire de les accompagner de près dans leur travail. Ces questionnements seront à l’ordre du jour lors des prochaines commissions distribution bio, créée par A Pro Bio en 2025.

Lien de l’étude distribution : https://www.aprobio.fr/analyse-de-la-distribution-bio-dans-les-hauts-de-france/

« Il faut réenchanter le magasin »

Pour présenter en avant-première son étude, A Pro Bio a organisé, le 18 novembre dernier à Villeneuve d’Ascq, une soirée en partenariat avec Bio Linéaires. Raphaël Faucheux (adhérent d’A Pro Bio et dirigeant du magasin Biomonde Harmonie Nature à Lille) et Florent Leroy (vice-président d’A Pro Bio et dirigeant de Fournil Bio à Villeneuve D’Ascq) nous font un retour sur l’étude et la soirée.

Raphaël Faucheux.
Bio Linéaires : Raphaël Faucheux, quel bilan faites-vous de cette soirée ?

Raphaël Faucheux : C’est une soirée positive qui a permis de rassembler une soixantaine de professionnels bio des Hauts-de-France à la fois des transformateurs, des distributeurs et même des producteurs. Cela nous a montré une forme d’énergie collective et nous a inspiré et aidé à cette prise de conscience que cette force collective devait émerger afin d’aller plus loin et ainsi nous permettre ensemble de faire tomber certaines barrières pour faire avancer la bio et plus spécifiquement celle notre région.

On s’est appuyé sur l’étude distributeur qui a été faite par A Pro Bio. Une étude très qualitative, très fouillée qui a demandé un gros travail et qui nous a permis de faire émerger plusieurs points. Tout d’abord en tant que distributeur on s’est aperçu que l’on a beaucoup de points communs et intérêt à s’ouvrir les uns aux autres et travailler ensemble. Le deuxième sujet concerne le climat de reprise que l’on constate depuis 2024 sur lequel il faut rester très prudent. Il y a une recomposition du marché et des acteurs et on doit s’interroger sur le coup d’après et la suite dans nos magasins : comment travailler sur l’attractivité, la désirabilité, se poser les bonnes questions pour continuer à fidéliser et à s’occuper de nos clients, mais aussi nos équipes et surtout faire venir dans nos magasins, par un discours plus « clarifié », une nouvelle clientèle, peut-être plus familiale, pour la régénérer et la rajeunir. Enfin, mettre en avant nos dynamiques locales à la fois dans l’approvisionnement et la présence des produits (locaux et/ou régionaux) dans nos magasins. Comment valoriser ces produits qui font sens et qui font partie de notre ADN pour lesquels il y a une forte attente du consommateur !

Florent Leroy.
Bio Linéaires : Florent Leroy, pourriez-nous faire un retour sur la soirée ? 

Florent Leroy : La soirée a été un vrai succès car plus de 60 personnes se sont retrouvées chez un acteur historique, Le Moulin d’Ascq. La presse locale mais aussi économique a répondu présent pour avoir les résultats de cette étude. Il est important de décloisonner la filière bio pour montrer que la filière bio est une vraie filière économique et « Dieu » sait que dans les Hauts-de-France on a besoin d’une filière bio forte car nous sommes la dernière région en SAU bio.

BL : Comment est organisé la distribution de produits bio dans les Hauts-de-France et comment se porte-t-elle ?

F. L. : On a une vraie diversité dans la distribution des produits bio. On a bien évidemment la GMS qui déréférence encore massivement aujourd’hui les produits bio mais dont on a besoin car certaines filières bio ne tiennent que parce qu’elle est là. Puis les magasins spécialisés bio qui, a priori, ont atteint une forme de plancher et qui reprennent aujourd’hui du « poil de la bête ». On a aussi l’impression que les groupements et les réseaux comme Biomonde, Biocoop, Naturalia, Léopold souffrent un peu moins que les indépendants. Enfin, les EAP –  qui mine de rien sont toujours là – apportent du lien social dans des territoires où il n’y aurait pas forcément de modèles économiques pour les magasins bio spécialisés. C’est important et il faut sans doute trouver des formes de collaboration avec ces EAP pour les soutenir.

BL : Quels enseignements tirez-vous de l’étude distribution d’A Pro Bio pour que la Bio redémarre ?

F. L. : Pour que la Bio redécolle vraiment, je pense qu’il faut faire un peu de « lobbying » auprès de la GMS pour qu’elle arrête les déréférencements. C’est ce qui a l’air de se préparer ! Ensuite, au niveau des magasins spécialisés bio, il faut que l’on refasse notre vrai métier. C’est-à-dire, ne pas être simplement des épiciers, des vendeurs de produits mais être dans le conseil et refaire le point sur tous les rayons. Je pense qu’il y a des rayons aujourd’hui qui sont un peu abandonnés comme le non-alimentaire et le rayon bébé. Il faut essayer de retrouver comment parler aux consommateurs qui ont besoin de ces produits. Evidemment pour le frais, les fruits et légumes et tous les produits sans EAN qui sont ultra stratégiques et essentiels, il faut impérativement que ces rayons soient nickel. Enfin, il faut réenchanter le magasin c’est-à-dire : comment faire pour qu’il soit de nouveau dans l’accueil et la fidélisation des clients qui sont là mais qui, peut-être, n’achètent pas assez dans nos magasins !

Antoine Lemaire

La référence pour les professionnels de la distribution bio spécialisée et alternative

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