
Malgré sa refonte, le label Haute valeur environnementale (HVE) présente encore « des incohérences, par exemple sur la possibilité d’utiliser des pesticides classés cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques certains » selon l’UFC-Que Choisir. L’organisme estime les indicateurs trop faciles à obtenir et juge que cette révision du label «n’est pas encore de “haute valeur”».
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Un arrêté et un décret du 18 novembre 2022 durcissent les critères d’obtention de la certification HVE à partir du 1er janvier. «Le référentiel rénové ne comporte plus de voie B et ses exigences ont été revues à la hausse sur les indicateurs de protection de la biodiversité, de limitation de l’usage de produits phytosanitaires, et de gestion raisonnée de la fertilisation», résume le ministère.
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Il faut dire que les voix s’accordant pour souligner le peu d’exigences de ce label qui n’aurait de «haute valeur» que le nom n’ont cessé de s’élever ces derniers mois :
- En mars 2021, l’IDDRI (Institut du développement durable et des relations internationales) publie un rapport demande «une suppression de la voie B : les données statistiques montrent en effet que les exploitations des filières à forte valeur ajoutée (viticulture) ou à fort coût de main d’œuvre (maraîchage) peuvent obtenir la certification sans aucune amélioration de leur performance environnementale» et «une révision de la voie A, les critères, indicateurs et seuils retenus limitant fortement l’ambition environnementale de la certification HVE (outre le fait qu’elle ne comprend aucun critère ou indicateur sur l’atténuation du changement climatique)».
- Une étude de septembre 2021 du WWF, Greenpeace et Basic passant au crible 11 démarches de durabilité alimentaire souligne que la «famille» de la certification environnementale (Agri Confiance, Zéro résidu de pesticides, Haute Valeur Environnementale), ont «les effets positifs les plus faibles et les moins avérés». Les résultats détaillés de ce rapport sont mis à disposition sur un site web dédié.
- À l’été 2022, la Cour des Comptes souligne «La concurrence croissante de la certification environnementale et HVE». La cour y relaie également l’analyse (non publiée) de la certification HVE de l’Office français de la biodiversité (OFB) qui «révèle que cette certification, dans la grande majorité des cas, n’entraîne aucune évolution des pratiques ni aucun bénéfice environnemental et invite dans ses conclusions à rendre plus exigeantes les modalités d’accès». De fait, l’OFB préconise la suppression de la voie B et note que la voie A «ne devrait être prise en compte dans le cadre des politiques publiques environnementales ou en tant qu’argument de commercialisation sans tromperie du consommateur qu’à la condition d’une révision profonde des critères d’éligibilité».
Enfin, la décision du ministère de l’Agriculture en fin d’année 2021 d’intégrer le label HVE dans les aides environnementales de la PAC (Politique Agricole Commune) créent un tollé. Il faudra finalement l’intervention de la Commission Européenne pour que le ministre de l’Agriculture propose une nouvelle feuille de route du Plan Stratégique National (PSN). Avec à la clé une différence de 30€/ha/an en faveur du bio.
Peut mieux faire
«À la lecture des nouvelles exigences, obtenir le maximum de points semble certes un peu moins facile, mais reste possible sans modifier substantiellement ses pratiques. Quelques items intéressants sont ajoutés, mais ils relèvent davantage d’une bonne gestion technique de l’exploitation que d’une réelle démarche de fond», détaille UFC-Que Choisir qui regrette que «le cahier des charges ne soit pas plus strict sur des enjeux majeurs». UFC-Que Choisir note également que «concernant les pesticides, utiliser des produits classés « cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques certains » (CMR1) n’est pas disqualifiant pour l’obtention du label» et le fait de «valider facilement l’indicateur sur la biodiversité (…), quelques centaines de mètres de haies et un assolement varié (avec plusieurs cultures, ce qui est la base d’une bonne gestion agronomique) assurent facilement la moitié des points nécessaires pour valider l’indicateur» et «l’indicateur «fertilisation» reste facile à obtenir si l’exploitation respecte déjà la Directive Nitrate (la réglementation européenne) – ce que l’agriculteur est censé faire». Pour l’UFC le compte n’y est pas. Et de conclure : «la révision n’est pas encore de “haute valeur”».
Sources : IDDRI – La certification Haute Valeur Environnementale dans la PAC : enjeux pour une transition agroécologique réelle ; Cour des Comptes Le soutien à l’agriculture biologique – Juin 2022 ; UFC-Que Choisir – Label Haute valeur environnementale – Dépoussiérage peu satisfaisant.